Dernière mise à jour le 24 juillet 2024
Parcours exigeant à la fois en matière de préparation et d’acquisition de compétences, l’installation en agriculture peut se dérouler sous de multiples formes. L’installation progressive en est une. Témoignage de Mathilde Gibert, ancienne salariée des Chambres d’agriculture ayant rejoint l’exploitation familiale.
Jeune agricultrice, Mathilde Gibert a bourlingué en occupant diverses fonctions para-agricole mais aussi en se rendant à l’étranger avant de rejoindre l’exploitation familiale en Seine-et-Marne où elle envisage de s’installer progressivement.
Issue d’une famille d’agriculteurs, Mathilde Gibert a intégré l’école d’ingénieur agronome de l’ISA à Lille où elle a poursuivi ses études pendant 5 ans. Son ambition initiale était de travailler dans le secteur du développement agricole pour les pays émergents. Egalement attirée par la communication et le marketing, elle a travaillé pendant son stage de fin d’études comme commerciale dans une entreprise plus axée dans les espaces verts.
"Cette expérience n’a pas été négative, mais elle m’a fait comprendre que cela ne correspondait pas à mes aspirations. Nous n’avions, au final, que très peu de contact avec la terre et le produit que nous étions chargés de commercialiser."
Changement de cap et retour vers son idée initiale, Mathilde prépare alors ses valises et son sac à dos pour se rendre aux Philippines et y travailler en tant qu’ingénieur conseil dans une ferme en permaculture. L’objectif était de développer des cultures arboricoles et fruitières en terrasses . Après cette expérience relativement enrichissante, notre exploratrice est rentrée en France pour s’y consacrer pleinement au secteur para-agricole.
"J’ai saisi l’opportunité d’une ouverture de poste pour travailler à l’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture. Ma mission, soutenue également par le ministère de l’agriculture consistait à parfaire la structuration du conseil à l’installation et à la transmission sur le terrain et dans le réseau Chambres d’agriculture. Cette expérience m’a permis d’avoir une ouverture d’esprit sur la grande variété des systèmes d’exploitation présents en France et donc sans mauvais jeu de mots, tous les champs du possible. Cela m’a permis également de découvrir la diversité des cultures et des élevages dans de multiples régions et donc d’acquérir une autre vision de l’agriculture que celle exclusivement tournée vers les céréales et les grandes cultures".
Depuis maintenant un an et demi, Mathilde a rejoint l’exploitation familiale en grandes cultures où elle travaille désormais au côté de son père.
"J’occupe, pour le moment le statut de salariée et envisage une installation progressive à moyen terme pour remplacer à part entière mon père âgé de 61 ans. Depuis mon entrée en activité sur l’exploitation, j’ai développé une nouvelle culture qui me tenait à cœur en réalisant la plantation de plus de 8 000 noisetiers sur près de 20 hectares. Le partenariat qui s’est tissé avec mon père est très positif. Il a toujours été conscient de l’intérêt qu’il peut y avoir à effectuer une diversification, tant en termes économique que d’épanouissement personnel et ne s’y est pas du tout opposé."
De plus en plus autonome, notamment dans la prise de décision et la conduite de l’exploitation, la jeune agricultrice est confrontée quotidiennement aux contraintes et réalités de la terre.
"Avec cette période de COVID, et ces épisodes de gel, d’intempéries et de sécheresse mon entrée en fonction n’a pas été facilitée. Quelle que soit l’étape des cultures les aléas de la météo génèrent un stress permanent. Ce dont je me suis aperçue également, notamment en grandes cultures, c’est que le matériel n’est pas encore totalement adapté à une utilisation de la part d’une femme, mais il faut bien faire avec. Ce dont je m’aperçois également et ce dont je n’avais pas encore perçue l’intensité, ce sont les périodes de rushs. Il est des périodes où les fenêtres de tir sont restreintes, notamment en période de semis et du fait de la météorologie. Il nous arrive ainsi d’enchainer jusqu’à 60 heures certaines semaines."
Pratiquer l’agriculture ne veut pas dire forcément vivre replié sur soi. Le choix de se lancer dans une diversification avec la production de noisettes est par exemple un facteur de rapprochement avec le voisinage.
"Par hasard, j’ai appris que l’un des agriculteurs voisins avait pour projet de monter une entreprise autour de la noisette. Depuis nous sommes plusieurs agriculteurs des environs à nous être lancés dans cette production, ce qui créé des rencontres, un partage d’expérience et une saine émulation".
En conclusion de cet entretien, Mathilde, après s’être longtemps cherchée, se dit pleinement épanouie dans sa nouvelle activité.
"L’agriculture cela procure des joies, des contraintes, parfois quelques déceptions, 20 % de mes noisetiers ont subi ainsi le gel et je viens juste de terminer de les replanter, mais cela reste un défi exaltant et cela nous apprend toujours l’humilité face à nos prises de décision et aux éléments extérieurs comme les aléas climatiques. L’activité agricole n’est pas une routine, il faut toujours savoir faire face à une certaine incertitude, analyser, s’adapter et prendre des décisions".
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