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Engrais : pourquoi les marchés s’emballent ?

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Les prix mondiaux des engrais flambent depuis fin 2021, et ont connu un pic inédit au cours de l’année 2022. L’urée, engrais azoté, est par exemple passée de 260 € la tonne en 2020 à 900 €/t fin 2021, pour atteindre 1040 €/t en avril 2022.

Cycle haussier enclenché à partir de 2021

A l’origine de la progression des prix des engrais, se trouve celle des prix de l’énergie. La production d’engrais, tout particulièrement azotés, est en effet gourmande, plus précisément en gaz. Or, les cours du gaz ont presque doublé entre fin 2020 et 2021, du fait de la relance de l’activité économique post crise sanitaire. A cela s’ajoute la hausse du coût du fret maritime, alimentée par la hausse des cours du pétrole et les pénuries de containers, toujours dans ce contexte de sortie des confinements à travers le globe.

Par ailleurs, la demande mondiale d’engrais s’est accentuée, tirée par les Etats-Unis et le Brésil, alors que deux exportateurs majeurs que sont la Russie et la Chine ont mis en place des mesures de restrictions de leurs exportations dès 2021 pour préserver les besoins de leur consommation intérieure. 

Le poids de la Russie sur les marchés des engrais

La guerre en Ukraine est venue exacerber cette situation. La Russie représente : 

  • près de 15 % des exportations mondiales d’engrais azotés
  • 14 % pour les engrais phosphatés 
  • et 19 % pour les engrais potassiques. 

La Biélorussie, alliée de Moscou, pèse pour 18 % des exportations d’engrais potassiques. L’incertitude sur le maintien des approvisionnements russes et l’effet des sanctions ont donc ajouté leur lot à la hausse des prix. 

La France dépend directement de la Russie à hauteur d’environ 7 % de ses importations d’engrais (en valeur). Nos principaux fournisseurs sont situés dans l’UE. Néanmoins, les matières premières nécessaires aux fabricants d’engrais européens - gaz naturel, ammoniac pierre à phosphate – sont notamment importées de Russie. 

Alors que de nombreuses unités de fabrication européennes tournent au ralenti pour faire face au renchérissement du coût de l’énergie, on estime que la capacité de productions d’ammoniac de l’UE est amputée de 50 %. Certains fabricants travaillent donc à l’adoption de procédés de fabrication d’engrais sans énergie fossile.

Quelles conséquences pour les exploitations agricoles ?

Le poids que représente le poste engrais dans les charges d’une exploitation est variable selon les caractéristiques des systèmes de production, le contexte agronomique de l’exploitation, l’itinéraire technique, mais aussi selon la stratégie d’achat d’engrais choisie par l’agriculteur. 

Les données du réseau INOSYS Réseaux d’élevage, dispositif de références technico-économiques des Chambres d’agriculture et de l’Idele, révèlent par exemple que, dans un système de production de bovins lait de plaine spécialisé, le poste engrais  représente  2,6% du coût de production.

Le suivi de l’indice des prix des moyens de production par l’INSEE montre, entre juillet 2021 et juillet 2022, une hausse de + 86 % du poste engrais et amendements. Notamment :

  • + 116 % sur l’ammonitrate
  • + 126 % sur les solutions azotées
  • + 91 % sur l’urée
  • + 71 % sur les engrais simples phosphatés
  • + 108 % sur les engrais simples potassiques

 

Dès lors, pour quels ajustements opteront les agriculteurs, à court et moyen terme ? Diminuer les quantités apportées ? S’orienter vers des cultures moins exigeantes en fertilisation ? Augmenter la part de légumineuses dans l’assolement ? le tout sans affecter le potentiel de production ? Si cette situation persiste, un tournant dans les pratiques devra être pris. Le conseil stratégique et pratique des Chambres d’agriculture pourrait ainsi être d’une grande utilité.