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Agriculture biologique : les produits d'élevage touchés par une crise structurelle

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L’agriculture biologique traverse une crise structurelle. La source en est une contraction des débouchés, qui touche quasiment toutes les filières, et en particulier les productions animales. La production dans l’essentiel des filières était pourtant en voie d’expansion. La demande s’est malheureusement contractée, certes du fait de l’inflation mais aussi d’un changement de comportement des consommateurs. Un plan de relance doit donc porter plus sur la demande en vantant par exemple les bénéfices environnementaux et diététiques de telles productions.

La part de marché des produits de l’agriculture biologique a su s’opérer d’une manière conséquente dans la consommation alimentaire des ménages, 6 % en 2022 pour 12 milliards d’euros de chiffre d’affaires (hors RHD). Les produits issus de l’élevage (œufs, produits laitiers, viande) ont rapporté près de 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022.

La production biologique en France s’est fortement étendue, notamment à l’aide de politiques publiques nationales et européens ambitieuses. La particularité des produits animaux bio réside dans le fait qu’il s’agit de marchés de niche, sauf en lait et en œufs. Les débouchés étaient donc, jusqu’au choc de l’inflation, restreints.

Le fléchissement des produits issus de l’élevage a globalement débuté dès l’année 2021. En 2022, les ventes de viandes biologiques ont reculé de 13%, le chiffre d’affaires s’établissant à 1 milliard d’euros. Entre 2020 et 2022 :

  • les produits carnés ont perdu 181 millions d’euros
  • les produits laitiers ont perdu à 151 millions d’euros

Seuls les œufs ont su se maintenir à un niveau stable en 2022 (après avoir diminué de 4 millions d’euros l’année précédente).

Une nécessaire campagne de valorisation auprès des consommateurs

Une sortie de crise relève davantage d’une série d’actions et de mesures dirigée vers la demande plutôt que vers l’offre. Il est probable que la diminution de l’inflation redonne de la vigueur aux achats des consommateurs. Ce ne sera qu’une partie de la solution. Car en se détourant des produits issus de l’agriculture biologique, les consommateurs ont à la fois exprimé une réticence à acheter plus cher, et, dans le même temps, un doute sur les caractéristiques intrinsèques des produits.

Le public cible de consommateurs de produits issus de l’AB s’était élargi durant plusieurs années, allant de la classe moyenne supérieure aux groupes sociaux plus modestes. Si le taux de pénétration du bio dans la consommation des ménages s’affaisse, c’est parce que ces catégories sociales modestes sont davantage exposées à l’inflation et à la stagnation de leur pouvoir d’achat.

Les fermetures successives de points de vente ont pu aussi participer de cette contraction de la demande. Dans un tel contexte, les leviers de redressement de l’agriculture biologique sont à identifier du côté du pouvoir d’achat des ménages, et de celui de l’information, ce dernier levier devant assurément être en phase avec un contexte économique et social complexe et tendu.

L’apparition de déconversions et de cessations 

Le développement de la production biologique semblait être une façon de répondre aux préoccupations sociales, sanitaires et écologiques des consommateurs. Cependant très peu d’interprofessions  ont envisagé un éventuel recul du marché et l’irrégularité de celui-ci a eu raison de projets ambitieux de développement.

Les agriculteurs et éleveurs qui se sont engagés pour des prix d’achats plus élevés n’y trouvent plus leur compte et les cessations d’activités élevées risquent de franchir le cap des nouveaux engagements. On risque d’assister à une vague de dé-conversion en 2024, après plus de trois ans de difficultés. Les produits alimentaires labélisés bio semblent être délaissés en période d’inflation mais l’inscription de l’aspect gustatif dans les plans de filière est aussi la démonstration que les intérêts des consommateurs ne sont pas nécessairement en phase avec la réglementation biologique. Selon le baromètre 2023 de l’Agence Bio, chez les consommateurs réguliers de produits bio :

  • 42% citent le goût des produits comme raison d’incitation à l’achat, 
  • devant le bien-être animal (31%). 

Pourtant lecahier des charges biologique ne contient pas de caractéristiques organoleptiques. De plus, les consommateurs réguliers de produits biologiques ont une alimentation davantage végétale qu’animale. La part de dépense en produit carnés est deux fois plus faible pour les ménages qui consomment bio régulièrement que pour les consommateurs moyens.

Ainsi les acheteurs de produits bio consomment plus de produits issus de crémerie et œufs (15% des achats biologique face à 12% en général), ce qui explique leur part de marché importante. Si le marché biologique est établi, il reste tout de même à la marge pour certaines productions, notamment les produits carnés où la part de marché bio n’excède pas les 10% . 

Une diminution de l’offre en grande et moyenne surface

Le renforcement des exigences européennes peut également accroître les difficultés économiques des éleveurs en augmentant les coûts de production comme cela fut le cas pour la filière volaille. A terme, cette hausse des coûts va conduire à une augmentation des prix à la consommation, alors même que celui-ci est cité comme le premier frein à l’achat de produits bio.

Les circuits de distribution opérant en mode mixtes peuvent se permettre de compenser le recul des achats bio en proposant une offre de produits qui s’adapte aux besoins des consommateurs. L’offre des assortiments bio a diminué de 5,4 % pour les hypermarchés et de 12,7 % pour le e-commerce, limitant par conséquence les débouchés, ce qui participe à engorger marché biologique.